Nouvelles du Canada arabe
Nouvelles
Publié: mars 12, 2025
Aziz Rabah
Mardi 11 mars 2025
Il y a un consensus sur le fait que la sécurité alimentaire représente une priorité nationale et qu’elle a été adoptée comme objectif du plan vert puis du Green Generation, car le pays ne peut rester otage des marchés mondiaux, des tensions environnantes et des commerçants avides qui ont perdu tout sens du patriotisme, ignorent leurs obligations et ont exploité les conditions de sécheresse, l’absence de régulation du marché, la faiblesse du contrôle et parfois la complicité de l’administration, ce qui a créé un grand mécontentement dans les milieux populaires, voire même au sein des cercles étatiques.
Le mécontentement a augmenté face au non-respect par les grands agriculteurs surtout, qui ont reçu des centaines de milliards de dirhams en soutien et ont accès à des dizaines de milliers d’hectares depuis la cession des terrains des entreprises publiques liquidées, Sodéo et Soujit, jusqu’à présent où ils bénéficient des terres domaniales, des terres des collectivités coutumières ainsi que des biens waqf. Cela s’ajoute aux exonérations fiscales évaluées à plusieurs milliards de dirhams par an, aux compensations en cas de crises telles que sécheresse et inondations, sans oublier un calendrier de services d'accompagnement, de soutien et de financement des programmes de développement agricole, notamment le développement et la rénovation des systèmes et réseaux d’irrigation, des routes rurales, le soutien au gaz et la liste est longue...
À cela s’ajoute un grand nombre de détenteurs de licences de pêche maritime, qui ont bénéficié de toutes les conditions d’aide offertes par l’État pour s’enrichir, depuis l’exportation et la transformation en exploitant les richesses des deux océans Atlantique et Méditerranée ainsi que les bassins d’élevage piscicole, jusqu’au soutien à l’achat et au renouvellement des bateaux et équipements… sans oublier les investissements publics importants et très coûteux dans les ports de pêche et les zones industrielles connexes.
Nombre d’entre eux prennent tout de l’État et demandent toujours plus... mais ils n’apportent aucune valeur ajoutée qualitative ni à l’État ni à la société, même lorsqu’ils reçoivent un soutien à l’importation en cas de pénurie, comme ce fut le cas lors de l’Aïd al-Adha l’année dernière ! Ils ne contribuent donc pas de manière significative à la réalisation de la sécurité alimentaire, au renforcement de la classe moyenne agricole en milieu rural, au développement de l’industrie agroalimentaire, de l’équipement, à l’investissement dans la formation professionnelle agricole et maritime, ni à la recherche scientifique.
Il ne fait aucun doute que l’État, avec la fermeté dont il fait preuve actuellement pour lutter contre la cherté et pour punir les responsables, ce qui est apprécié par les citoyens qui souhaitent qu’elle soit toujours complète, générale et dissuasive… est appelé à revoir les conditions des contrats et cahiers des charges avec tous les bénéficiaires des terres, des aides, des exonérations et privilèges pour les contraindre à respecter leurs engagements, quels que soient leurs statuts et positions, pouvant aller jusqu’à récupérer certains avantages ou les inscrire sur une liste noire qui les empêcherait d’obtenir tout nouveau privilège ou soutien, même dans d’autres secteurs.
Le processus de libéralisation, de privatisation, des privilèges et des créances a montré que le recours à une élite économique nationale et son habilitation à toutes les conditions d’excellence et de concurrence pendant des décennies n’a pas produit les résultats escomptés, car deux tendances s’y sont développées : l’une dominée par la logique du profit sans considération des équilibres sociaux, l’autre incapable de réaliser une capacité concurrentielle sur les marchés national et mondial, dépendant toujours des ressources et incitations de l’État, avec dans les deux cas la présence de nombreuses catégories qui se soustraient à leurs obligations envers l’État et la société !!!
Il serait donc préférable que l’État initie la création d’une ou plusieurs entreprises publiques de sécurité alimentaire spécialisées dans l’agriculture, la pêche maritime et toutes les activités connexes, du production à la vente directe au citoyen, avec la cession des terres disponibles issues des terres coutumières, des domaines de l’État, des waqf, ainsi que leur aide à l’acquisition de terres privées. S’ajoutent à cela les licences de pêche maritime, d’élevage piscicole et également des licences d’investissement avec des conditions préférentielles dans le secteur de la logistique pour le stockage, le transport et la distribution ainsi que le secteur de l’industrie agroalimentaire, depuis les locaux industriels jusqu’à la production.
Elle devra conclure des partenariats multiples avec tous les intervenants du secteur de la sécurité alimentaire tels que l’Office chérifien des phosphates, l’Agence de développement agricole, l’Office national de la pêche maritime, les instituts de recherche scientifique spécialisés en agriculture, pêche maritime et eau, le bureau de formation, les instituts de formation professionnelle, ainsi que d’autres entreprises ouvrant des perspectives de développement, de production durable, de qualité et de commercialisation solidaire.
En outre, cette ou ces entreprises pourront investir dans certains pays présentant de bonnes potentialités alimentaires et logistiques afin d’approvisionner le marché national.
Elle pourra également créer de grands marchés conformément aux dispositions préservant l’équilibre entre la compétitivité du secteur, les intérêts des investisseurs privés et les capacités des citoyens.
Et afin de ne pas dévier de son objectif suprême et d’assurer sa pérennité avec le sérieux nécessaire, elle devra bénéficier d’une attention particulière pour être au niveau des établissements stratégiques prévus par la loi organique relative aux établissements publics, en étant soumise à un système de gouvernance rigoureux qui guide les coûts et améliore les résultats.
Ainsi, l’État pourra garantir la régulation et la maîtrise du marché des produits alimentaires et en même temps permettre à de nombreuses couches de la société d’accéder à ces produits à un coût moindre et de meilleure qualité.
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