Nouvelles du Canada arabe
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Publié: janvier 26, 2023
Les médecins peuvent exercer la médecine partout dans le monde car la médecine elle-même est la même où que nous soyons, mais le défi réside dans l'apprentissage du système de santé local, de ses règles et de ses règlements, puis dans leur application. Ainsi, le principal obstacle auquel sont confrontés les médecins venus de l'étranger au Canada est la manière de s'intégrer dans un système de santé différent, de comprendre et d'appliquer ses lois et ses règlements.
Le sujet de l'intégration avec les systèmes et les lois ne concerne pas seulement les médecins, mais toutes les personnes venant d'endroits différents avec des habitudes et des traditions qui peuvent ne pas être compatibles avec les lois et règlements canadiens.
Il est courant dans nos pays arabes, et peut-être dans tous les pays de l'Est, que les médecins soignent leurs amis et leurs proches, et qu'ils considèrent leurs patients comme des amis. Il est également normal de voir un médecin et son patient manger ensemble dans un restaurant ou une cafétéria, voire même voyager ensemble pour une sortie. De plus, il n'est pas rare qu'un médecin épouse sa patiente ou qu'une médecin épouse son patient.
Le médecin qui tente dans nos pays de poser des limites et de restreindre sa relation avec ses patients, ou qui essaie d’adopter un comportement professionnel et officiel, semble compliqué et excentrique, et est perçu comme arrogant et prétentieux.
Lorsque j'ai commencé à exercer la médecine au Canada, j'ai ressenti un confort et une joie face aux nombreuses lois qui régissent le travail des médecins, notamment la règle interdisant aux médecins de soigner leurs amis et leurs proches, que j'ai appliquée avec joie et un grand bonheur, convaincu de son importance et de son bénéfice tant pour les médecins que pour les patients. Il y a aussi l'insistance constante pour que la relation entre médecins et patients reste strictement professionnelle et officielle, confinée au lieu de travail du médecin et ne dépassant pas ses murs.
Ce n'était pas facile pour les patients au début, et le problème principal que j'ai rencontré était la difficulté des gens à accepter cette méthode qui leur semblait étrange et peut-être inacceptable.
Les patients pensent que leurs visites médicales répétées chez moi, et le fait que je sois arabe, ont transformé notre relation professionnelle en une relation d'amitié, au point qu'ils croient avoir des droits et une priorité sur tout. Ils pensent même que je pourrais enfreindre les règlements et peut-être les lois pour eux. Cela a causé de nombreux problèmes du fait de leur difficulté à comprendre les limites que j'ai essayé d'établir dès le premier jour. De nombreuses situations douloureuses et regrettables sont survenues, dont les fins n'ont heureusement jamais été positives sous aucune forme.
Les médecins arabes souffrent beaucoup du manque de compréhension des patients arabes quant à la nature de la relation qui doit exister entre eux et leurs médecins. Les médecins s'efforcent de maintenir une relation strictement professionnelle et officielle, tandis que les patients, avec de bonnes intentions, essaient de la transformer en une relation sociale et personnelle, ce qui se fait finalement au détriment de la relation professionnelle, troublant l'harmonie entre eux et affectant ainsi la santé du patient d'une manière ou d'une autre.
Il est dans l'intérêt du patient que la relation entre lui et son médecin soit strictement officielle afin que la réflexion et le travail du médecin soient limités à l'état pathologique uniquement, sans être distraits par des affaires qui ne servent pas la santé du patient.
Le fait que le patient croit que sa relation avec son médecin n’est pas uniquement officielle augmente ses attentes envers le médecin. Lorsque ces attentes dépassent la capacité du médecin et qu'il lui est impossible d’y répondre, cela provoque chez le patient une grande déception et frustration, ce qui jette une ombre sur la relation entre eux et a un effet négatif sur la santé du patient.
Je comprends parfaitement les bonnes intentions de la grande majorité des patients, mais les bonnes intentions peuvent parfois ne pas être suffisantes, voire être nuisibles.
Personnellement, j'aimerais que la majorité des patients soient mes amis si la loi le permettait, et j'aimerais que nos relations sociales soient profondes et complètes, mais les lois canadiennes qui régissent la relation entre médecins et patients nous en empêchent, car la règle établie à cet égard est claire et explicite : « Ton ami ne peut pas être ton patient et ton patient ne peut pas être ton ami ». Nous devons donc respecter et appliquer cette règle à la lettre pour le bien des deux parties.
Dr. Jussam
Centre médical Medheaven - Ottawa
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