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Kthib 2 : Entre la virtuosité cinématographique, la créativité et la science-fiction

Kthib 2 : Entre la virtuosité cinématographique, la créativité et la science-fiction

By Mohamed nasar

Publié: mars 23, 2024

Vivent les combattants ! ‘‘ C’est par cette phrase que Paul Atréides, héros de Dune 2, encourage les combattants de la tribu des Fremen de la planète Arrakis contre les Harkonnens qui contrôlent cette planète désertique riche et la seule source dans l'univers de l’Épice.

Cette scène a été publiée il y a plusieurs mois dans la deuxième bande-annonce du film du réalisateur canadien Denis Villeneuve, sorti au début de ce mois et ayant généré des recettes totales de plus de 500 millions de dollars américains.

Le héros l’a dite en langue fremen, Chakobsa. Cette phrase n’est autre qu’une citation de l’un des slogans que le peuple algérien scandait aux premiers jours de l’indépendance de son pays en 1962.

Dans le roman de science-fiction ‘‘Dune’’ publié en 1965 et adapté au cinéma par Denis Villeneuve, l’auteur américain Frank Herbert utilise l’expression ‘‘Vivent les martyrs.’’

Il s’agit d’une expression inexacte, car les Algériens disaient en réalité ‘‘Vive l’Algérie’’.

Cependant, l’utilisation de cette phrase montre l’influence des mouvements de libération des peuples du Sud et des cultures du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord en général sur l’auteur lors de l’écriture de son roman et sur son adaptation cinématographique ultérieure.

Par exemple, le nom du peuple de la planète Arrakis, les Fremen (proche de ‘‘hommes libres’’ en anglais), n’est rien d’autre que la traduction du mot ‘‘Amazigh’’ (hommes libres) que les peuples autochtones du Maghreb se donnent.

L’épice demandée sur la planète Arrakis symbolise le pétrole, source des conflits et des guerres au Moyen-Orient tout comme dans l’univers de Dune.

Le tatouage sur le visage des femmes Beni Gesserit, groupe de femmes bénéficiant d’une grande influence religieuse et politique dans l’empire, rappelle le tatouage des femmes amazighes en Afrique du Nord.

La langue fremen, Chakobsa, inventée par Frank Herbert, emprunte plusieurs mots à la langue arabe avec de légères modifications. L’auteur a ajouté un lexique à la fin de chaque volume de sa série composée de six tomes pour aider les lecteurs.

L’écrivain a utilisé le mot ‘‘Fedaykin’’ comme nom des combattants fremen. C’est une métaphore du mot arabe ‘‘Fedayin’’, pluriel de Fida’i.

Les Fremen croient en ‘‘la langue de l’invisible’’ ou le Mahdi qui les conduira au paradis. C’est une référence directe à une croyance islamique concernant la venue du Mahdi qui sauvera l’humanité à la fin des temps.

Le nom ‘‘Shai-Hulud’’ est donné aux vers des sables géants, parmi les exemples tirés de l’épopée futuriste de Frank Herbert qui a trouvé son chemin dans le film de Denis Villeneuve.

Cependant, certains critiques ont reproché à Denis Villeneuve d’avoir ‘‘blanchi’’ l’histoire en enlevant certains mots utilisés dans le roman pour le film.

Dans le magazine ‘‘The New Yorker’’, Manveer Singh, professeur assistant d’anthropologie à l’Université de Californie à Davis, a critiqué David J. Peterson, créateur de la langue artificielle et collaborateur du film, pour avoir supprimé de nombreux mots inspirés de la langue arabe dans la langue fremen.

Peterson justifie ce choix par la question de la crédibilité de la langue utilisée dans le film. Sur le réseau social ‘‘Reddit’’, il a écrit que ‘‘la profondeur temporelle du roman ‘Dune’ rend impossible de savoir si la langue arabe sera toujours connue à ce moment-là.’’

Frank Herbert a utilisé dans son roman le mot djihad pour parler de la guerre menée par Paul Atréides avec les Fremen contre les Harkonnens.

Selon Manveer Singh, ‘‘Herbert a vu le djihad comme l’incarnation de la passion religieuse - une force sociale transformatrice et peut-être libératrice, mais aussi dangereuse.’’

Le film évite ce mot et emploie à la place l’expression ‘‘guerre sainte’’ pour se distancer de toute référence à l’extrémisme islamique et au terrorisme tel qu’il est perçu par le public américain dans le monde arabe.

Le film Dune : partie deux est sorti le 29 février dans le monde arabe. Il est resté à l’affiche pendant une semaine seulement, à Dubaï, Doha, Beyrouth ou Riyad.

Selon la stratégie marketing, il sera repassé à la fin du Ramadan, le 11 avril prochain, période pendant laquelle les salles de cinéma sont généralement vides. Le public y revient pour l’Aïd.

Les producteurs préfèrent lancer leurs films à ce moment-là, à l’instar des sorties cinématographiques pendant la saison des fêtes dans d’autres parties du monde.

Denis Villeneuve et certains membres de l’équipe du film ont participé à la première de Dune 2 au Moyen-Orient qui a eu lieu le 18 février à Abou Dhabi, aux Émirats Arabes Unis.

Ce choix n’est pas un hasard. Le film a été tourné dans le désert de Liwa à Abou Dhabi, connu pour ses dunes, un cadre naturel pour représenter la planète Arrakis.

Selon les autorités d’Abou Dhabi, près de 20 lieux de tournage ont été utilisés ‘‘au cours de l’hiver 2022, et une équipe composée de 300 employés locaux, 250 employés internationaux et 500 employés supplémentaires a été engagée pendant 27 jours de tournage.’’

Une partie du film a été tournée en Jordanie, notamment dans la région de Wadi Rum réputée pour ses canyons ou Wadi Araba.

Après la vague des avant-premières de son film, Denis Villeneuve a affirmé la semaine dernière sur les ondes de la Société Radio-Canada que son film ‘‘fonctionne maintenant par lui-même. Je n’ai plus de contrôle sur la manière dont les gens le reçoivent.’’

Depuis la sortie du film, les médias des pays arabes se sont intéressés à la virtuosité cinématographique du film, mais il n’a pas reçu de critiques objectives notables.

Mercredi dernier, la critique de cinéma Alyaa Tolaat a écrit sur le site d’Al Jazeera que Dune 2 est une ‘‘vision épique d’un roman qui reproduit la suprématie blanche’’, et quand Paul Atréides s’allie avec le peuple fremen pour combattre les Harkonnens qui exploitent l’épice d’Arrakis au profit de l’empire, la critique considère que cela représente ‘‘le colonialisme blanc en Afrique, en Asie ou en Amérique latine.’’

Elle a estimé que le fait que Paul Atréides ne soit pas un Fremen perpétue l’idée que ‘‘les peuples inférieurs doivent être soumis à l’homme blanc.’’

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